De la symétrie des intentions à la symétrie des attentions : une nouvelle ère s’ouvre

Quand ERDIL a été créée il y a dix ans, je publiais mon premier ouvrage1, y évoquant pour la première fois une notion qui allait faire du chemin : la symétrie des attentions2….

La symétrie des attentions : une démarche (relativement) nouvelle

En 2007, personne ou presque ne parlait encore de ce sujet en France, même si ailleurs cette intuition avait déjà pu émerger – chez Southwest Airlines notamment. De même, bien des entreprises possédaient déjà dans leur ADN des valeurs et des pratiques très proches, qu’il s’agisse de Leroy Merlin ou de Starbucks. Pour autant, cette idée était loin d’être devenue le moto des grandes entreprises et des consultants.

Alors pourquoi, depuis dix ans, ce postulat managérial a-t-il pris progressivement son envol en France, pour être aujourd’hui repris par des entreprises telles que Orange, la Poste, SNCF, BNP Paribas, Carrefour ?

Des équipes demandeuses d’une nouvelle forme de management

Une des raisons de cette évolution renvoie aux équipes et à la nécessité de faire évoluer nos modes de management, notamment lorsque l’orientation client/expérience client (re)devient centrale. Sans un engagement managérial fort, une exigence qui s’inscrit en miroir de celle que l’on a du point de vue de l’expérience client, rien ne peut fonctionner dans la durée. Ce nécessaire alignement des niveaux d’exigence est aujourd’hui un constat de plus en plus partagé.

Les équipes, en lien ou non avec cette question, expriment aujourd’hui de réelles attentes vis-à-vis de leurs managers : pouvoir faire preuve d’initiatives et jouir, à ce titre, d’un droit à l’apprentissage (et donc à l’erreur) ; voir leurs propres irritants être pris au sérieux et traités par l’entreprise, pour pouvoir effectivement consacrer leur énergie à la satisfaction des clients…

Ces attentes, sans être bien nouvelles, sont sans doute plus prégnantes de nos jours, notamment pour les collaborateurs les plus jeunes, plus accoutumés que leurs aînés au respect et à l’écoute de leurs désirs et de leurs idées. Pour ces populations, les modes de management « à l’ancienne » deviennent contre-productifs, désuets, et, pour le dire clairement, inappropriés. En ce sens, symétrie des attentions et générations connectées sont étroitement liées3.

Transformer l’expérience client et celle des collaborateurs

De plus, bien des métiers sont en questionnement quant à leur avenir et à celui des équipes en contact – notamment du fait de la digitalisation. Hypermarchés, banques de détail, transports publics… sont autant d’activités pour lesquelles « réinventer l’expérience client », réinjecter du sens, de la valeur et de l’énergie dans cette relation, deviennent vitaux. Dans un tel contexte, aller chercher au plus près du terrain de l’engagement et des idées nouvelles requiert d’adapter les modes de management. Que l’on parle de symétrie des attentions ou de libération, les entreprises doivent pouvoir mobiliser leurs équipes au service de modèles économiques fragilisés.

Les DRH, qui ont trop souvent laissé passer le train de la transformation, ont semble-t-il commencé à préempter le terrain de la symétrie des attentions, comme on le voit chez Carrefour ou aux Galeries Lafayette. Elles ont pris conscience de leur légitimité sur un sujet qui les repositionne dans le sillage des enjeux de l’expérience client.

La symétrie des attentions à l’heure de l’action

Ici ou là on rencontre des dirigeants réellement inspirés, porteurs d’une vision du management dans laquelle la symétrie des attentions trouve place : de Keolis à Carrefour, de Leroy Merlin à Norauto en passant par la MAIF, qu’ils soient toujours aux commandes ou partis vers de nouvelles aventures, des managers et des dirigeants inspirants œuvrent – ou ont œuvré – au renouvellement des pratiques managériales. Sans oublier, bien sûr, G. Le Houérou (aujourd’hui franchisé Ibis et Président des franchisés de cette même marque), à qui nous devons cette inspiration séminale à propos de la symétrie des attentions.

Les exemples précédents ont montré que la symétrie des attentions occupe aujourd’hui une place importante dans les démarches de transformation et/ou d’expérience client. Les sociétés sont véritablement en train de passer de l’ère de la symétrie des intentions à celle de la symétrie des attentions : une période de concrétisation, de réel engagement managérial pour que les « choses changent » réellement dans les esprits et les pratiques, au-delà des incantations et des déclarations de convenance.

Notes

1 : Du management au marketing des services, 1ère édition, Dunod, avec C. DITANDY
2 : La Symétrie des attentions est une marque déposée de l’Académie du Service
3 : A ce sujet, cf. l’ouvrage que j’ai publié avec T. SPENCER, Le management de la relation client, Vuibert, 2016.

Date

24 mai 2017

Auteur
Portrait Benoît Meyronin - Tribune de la Relation Client

Benoît Meyronin

Associé fondateur de l’Académie du Service et professeur à l’EM Grenoble

Associé fondateur de l’Académie du Service et professeur à l’EM Grenoble, Benoît Meyronin a écrit plusieurs livres autour de la relation client dont le dernier, co-signé avec Thierry Spencer s’intitule Le management de la relation client, Symétrie des attentions, digitalisation et coproduction.